Morey Saint Denis: Première partie, Les vins d'appellation "village" situés en haut de coteau
Morey Saint Denis: les vins d'appellation "village" situés en altitude:
Le finage de Morey est moins étendu que celui de sa voisine Gevrey-Chambertin, il a en revanche une remarquable unité structurelle qui confère à ses parcelles classées en appellation village une certaine similarité avec les crus avoisinants. Loin d'être de simples faire-valoir moins onéreux si on les compare aux crus, les Morey ont une classe qui de mon point de vue les place dans les "meilleures affaires" du nuiton. D'autant que le niveau moyen de la viticulture est ici très élevé.
Quatre blocs différents - dont deux sur le coteau - peuvent être considérés en tenant compte de leur altitude et également de leur encépagement. Ces surfaces sont toutes assez homogènes et il est assez rare d'observer des noms de lieux-dits sur les étiquettes même si quelques uns d'entre eux sont depuis fort longtemps isolés. Enclavés entre le calcaire dur de Comblanchien qui coiffe le coteau, la plaine alluviale à l'Est et les vignobles de Chambolle et Gevrey, ces hauts et bas de coteaux ont longtemps - avant les AOC - été vendus - par équivalence de classe comme le faisait le négoce du 19ieme - sous le nom de Gevrey-Chambertin car leur lignage est sans aucun doute plus affirmé ici qu'avec celui de Chambolle. La commune en a sans doute un peu souffert sur le plan de la notoriété car elle est de ce fait moins renommée que ses voisines. Et puis je crois que les producteurs ne souhaitent pas sur ce nom seul de Morey produire de crus trop onéreux, on retrouve ici une large part de l'esprit simple et sage des loups. Une vision qui a également été portée par la production de coopératives qui tout au long du vingtième siècle ont très largement contribué dans cette commune à produire et diffuser ce vin marchand et très qualitatif. Un fait à souligner car en dehors des hautes Côtes les structures collectives ne se sont jamais complètement implantées dans le Nuiton même si les idées de gauche y étaient un peu plus implantées - à l'époque! - que sur le beaunois.
Le premier bloc de "villages" au Nord est composé de trois lieux dits à forte historicité, on peut l'appeler secteur des Monts Luisants et il est juste situé entre la Combe de Morey et la petite Combe Grisard colonisée par des résineux plantés par les eaux et forêts il y a une petite centaine d'année.
Incluant le bord Nord la minuscule Côte Rôtie aujourd'hui dans les maisons et le Pierre Virant. Site "pentu" complanté de pinots, chardonnays et Aligoté, selon les parcelles,il s'agit d'une zone mixte parfaitement digne de porter des blancs fins et frais et des rouges légers et spirituels. Une petite production très rare qu'il faut rechercher au domaine des Monts Luisants ou chez Les frères Lecheneaut qui produisent en Pierre Virant un vin blanc superbe. Il me semble que ce secteur est le meilleur de Morey pour les vins blancs et que c'est ici que devrait se situer les cuvées blanches les plus personnelles de la Côte de Nuits. On y retrouve la densité des belles cuvées de Saint Aubin et le corps de ces vins me rappelle Les Chatenières et Murgers des Dents de Chiens. En vinifier serait un honneur...
Le second bloc fait face au premier, sur l'autre versant de la Combe et ne manque ni d'atouts, ni d'antériorité. En effet les Larrets froids, la Bidaude et le haut des Larrets furent probablement inclus - surtout les deux derniers - dans les cuvées de Lambrays lorsque la famille Rodier les possédait. Il n'est d'ailleurs pas interdit de penser que ces Lambrays là plus élèvés sur le coteau avaient un tout autre caractère. Plus nerveux, plus frais et certainement plus parfumés sur les petits fruits rouges et l'églantine. Mais ce sont évidemment des conjectures.
Les Larrets et Les Larrets froids sont des zones élevées positionnées à près de 300 mètres sur le coteau. Les sols très pierreux et blancs sont plus favorables au chardonnay et chose curieuse ils sont séparés par la Bidaude, incluant le petit clos (1,10 ha) convexe qui appartient en monopole au domaine Gibourg qui le vinifie dans les deux couleurs. C'est un vin construit dans les deux couleurs sur l'élégance. A découvrir en même temps que l'une des plus jolies cabottes de Bourgogne. Galeyrand et Jean Pierre Guyon produisent également sur le lieu-dit de jolis vins. Je ne connais qu'une cuvée rouge revendiquée de Larrets chez Frédéric Magnien et elle est de belle tenue, comme l'ensemble de ses vins. Les autres productions sont assemblées avec d'autres lieux-dits. Dans ce secteur le petit cru de En la Rue De Vergy a été assez fortement agrandi dans les années 70/80 par des parcelles essartées et conquises sur un côteau pentu, pierreux et difficile à mettre en forme. Blancs et rouges se mêlent et donnent des vins dynamiques et fins qui avec le vieillissement des ceps ont gagné en consistance. Bruno Clair, Virgile Lignier et Christophe Perrot-Minot savent mettre en valeur ces relativement nouvelles parcelles.
Patrick Essa - 2018
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