Les Corton situés sur le village de Ladoix-Serrigny
Les Corton Rognets, Vergennes, Mourottes, Carrières, Grandes Lolières, Toppe au Vert et Moutottes
Corton est un très vaste coteau qui sur trois communes abrite nombre de parcelles aux orientations et altitudes différentes. On ne saura jamais véritablement quelles raisons ont conduit à des classements aussi généreux hormis la commune d’Aloxe son village naturel d’origine. Car étendre vers l’Ouest, sur Pernand, le Charlemagne et vers le Nord le Corton rouge était déjà extrêmement permissif et de nature à satisfaire tous les propriétaires et syndicats des villages de Pernand et Ladoix, mais parvenir à conquérir quelques bouts de Charlemagne sur des parcelles distantes de près de 2,5 kilomètres du lieu originel fut un acte de bravoure confinant à l’exploit!
Rien de typiquement « Charlemagne » ne subsiste en Rognets ou Mourottes car ce sont des terres qui regardent le levant quand la nature de ce blanc unique est évidemment, éminemment Sudiste. Cela ne signifie en rien que les vins n’ont pas de grandes qualités, simplement ce sont des blancs de Ladoix qui auraient au même titre que Gréchons ou Nagets dû former un bloc singulier. Il en aurait plus de force et n’aurait point fait d’ombre au reste de cette commune qui peine à trouver une identité auprès des acheteurs.
Lavalle ne fait que la mentionner au milieu du dix neuvième siècle et le vingtième la laisse de côté en en faisant - un peu comme la voisine Chorey - une appellation discrète et mineure où le bon vin se négocie à des prix attractifs pour l’acheteur soucieux de maîtriser son budget et insensible à la notoriété du nom de cru. Ce finage étrange entaillé d’une combe sèche, constellé de carrières comblées et de lieux de dépôts carriers possède les orientations les plus diverses et des pentes aux inclinaisons parfois vertigineuses. Morcelé, peu uniforme ce finage touche au Sud les Renardes et les Bressandes en leur offrant un prolongement tourmenté et un nombre de lieux-dits grands crus conséquents et peu étendus.
Classer ces pentes, creux et bosses fut sans aucun doute complexe car la main de l’homme a ici particulièrement remanié la topographie des lieux laissant des fronts de taille et des buttes de déchets d’extraction, tout en autorisant apports de terre, mûrs et terrasses pour que la vigne puisse s’implanter et être mise en culture. Encore aujourd’hui parcourir ce relief montre à l’œil non avisé une morpho-géologie curieuse et bien peu évidente à comprendre même si comme toujours ce sont les parties hautes qui furent choisies pour autoriser la culture du chardonnay, le plus souvent dans les terres les plus claires...mais pas uniquement.
Les Corton-Vergennes (3.45ha) furent baptisées ainsi il y a probablement un peu plus d’un siècle. Ce climat aux formes irrégulières comporte un Clos et une butte de gravats probablement issues des déchets de tailles d’une carrière voisine. Il a appartenu à la famille du Comte de Vergennes, Charles Granier, qui fut un excellent ministre des affaires étrangères de Louis XVI. Est-ce pour cette raison qu’en dehors du Charlemagne il est le seul blanc du secteur à pouvoir mettre son nom en plus de « Corton »sur son étiquette? Ou est-ce plutôt en raison d’un parcelle cultivée par les Hospices de Beaune à la suite d’un don fait par son ancien propriétaire, Paul Chanson? Toujours est-il que ce vin blanc magnifique trouve avec ce nom de haut lignage un patronyme à sa hauteur.
Ces terres blanches, calcaires et caillouteuses sont pauvres et la vigne y souffre assez pour donner des raisins concentrés ayant une profondeur de texture incomparable et surtout si différentes des Charlemagne. Vin de finesse, éclatant et aérien, il peut regarder dans les yeux les plus belles cuvées de la Côte lorsqu’il est à son meilleur. Les Hospices et Chanson, mais également le Château de Meursault produisent ici des vins d’une très belle énergie.
Le domaine Cachat possède quant à lui un Clos dans la partie basse des Vergennes, très différent et produit en rouge, il ressemble beaucoup plus aux Maréchaudes qui ne sont pas très éloignées car le sol est plus profond. Un vin élégant et raffiné.
Les Corton-Rognets (12ha 40a): Les crus de la montagne de Corton ont en général une morphologie régulière faites de pentes plus ou moins prononcées sur des rectangles de terre quasiment découpés à la règle. Le Rognets est lui beaucoup moins bien « cafastré » car on l’a en partie « rogné » pour le séparer du Corton d’Aloxe, avec des zones hautes médianes et basses qui autorisent des différences stylistiques notables. Sa partie haute située dans le prolongement des Renardes d’Aloxe est en fait un Clos à la mode bourguignonne puisqu’il n’est pas complètement ceint de mur. La maison Faiveley a eu la possibilité dans les années Mille neuf cent trente de lui donner le nom assez inespéré de sa marque commerciale. Ce « Clos des Corton Faiveley » est donc naturellement un Rognets mais est désormais connu comme une des entités rouges les plus qualitatives du secteur...alors qu’elle n’a qu’une quasi inexistante historicité. Un mystère qui n’en n’est pas un tant cette zone médiane élevée, posée sur un calcaire dur mêlé d’éboulis et d’argile, est qualitative. Le reste du climat n’est pas moins bien loti si l’on excepte les quelques carrières comblées qui ne peuvent prétendre à toute la complexité du cru mais un fait est certain presque tout le Rognets est au niveau d’un cru d’élite. Les parties basses sont un peu plus humides et procurent aux vins une richesse de sève plus marquée, les zones médianes et hautes ressemblent fortement aux Renardes voisines avec un côté très sauvage et une race sanguine étonnante. Ici les domaines Méo - en bas - Clavelier - en haut produisent des crus largement au niveau des belles appellations du nuiton qu’ils bonifient également. A des prix plus attractifs.
Les autres lieux-dits grands crus sis sur le finage de Ladoix - Mourottes, Lolieres, Carrières, Mourottes, Toppe au Vert - n’auraient pas dû être élevés à ce statut tant ils ne semblent pas pouvoir obtenir la qualité ultime que l’on réclame logiquement à ce niveau. Le cas des Mourottes et Toppe au Vert est résolu puisqu’il n’en n’existe pas de revendiqués. Les vins sont assemblés ou déclassés en premier cru par le domaine Capitain qui montre ici un certain bon sens et un grand sérieux.
Les Mourottes, Hautes et Basses sont des terres assez élevées qui donnent des Charlemagne assez fins mais qui manquent un peu de fond et de consistance. Évidemment il en est de fort bien vinifiés qui peuvent donner le change quand ils sont élevés avec des bois de haute qualité et avec maestria mais toutefois leur potentiel n’a rien à voir avec les « vrais » Charlemagne sur Aloxe. Il en est un peu de même pour le minuscule « Les Carrières » qui est aussi confidentiel que méconnu. Le niveau de cru de Ladoix leur irait parfaitement...mais je me répète!
Écrit par Patrick Essa - 2018
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