Kistler et Gantenbein...d'inspirations bourguignonnes!
Lorsque comme moi l'on produit du Bourgogne blanc - Meursault, Chassagne, Puligny, Charlemagne, Chablis - on est forcément intéressé par les formes que revêtent les grandes expressions de chardonnay étrangères à notre région. Il apparaît en effet indispensable de comprendre les codes qui régissent la production de vins issus de ce cépage en des pays où certains domaines n'ont aucune limite en ce qui concerne l'expression de la plus haute qualité.
La propriété suisse de la famille Gantenbein localisée dans la fraîcheur du canton des Grisons possède une belle réputation internationale et à toujours revendiqué son amour du Chablis et des vins racés et aériens du Nord bourguignon. Sur un petit hectare elle produit une cuvée unique et confidentielle qui est assez éloignée des modèles que l'on associe aux blancs de ce pays. Le vin est toujours très expressif, généreusement boisé et construit sur une matière serrée. Dans le passé je les ai souvent trouvé extravertis et un peu trop lourdement marqués par la patte du vigneron tout en disposant d'indéniables qualités aromatiques. Ce 2010 est plus discret et s'il est un peu moins riche que par le passé, il gagne en élégance et surtout en précision. Subtilement iodé, porté par une matière fraîche et impeccablement élevé, il n'a pas une grande matière mais se montre élancé et assez long. J'ai apprécié, et espère que le vigneron poursuivra dans cette voie plus proche sans doute du climat de sa belle région.
Kistler (Vine Hill vineyard) est une des cuvées blanches les plus réputées de Californie car son propriétaire a toujours cherché à produire des vins riches, concentrés et complexes pouvant se comparer en qualité et prix avec les meilleurs crus issus du chardonnay. Une large production est diffusée dans le monde entier et porte haut la qualité des crus de la zone fraîche de la Russian River. Ce 2008 a une forme étonnante car non filtré il se montre d'une très forte turbidité lui enlevant toute brillance. Cela génère immanquablement une note de lies qui évoque le pralin avec insistance au début puis plus noblement ensuite la noisette fraîche. La matière est très concentrée, visqueuse et enveloppante sur un "touché" de bouche à forte granularité "flavonoide". La finesse n'est évidemment pas sa première qualité mais son niveau d'alcool élevé lui procure une certaine persistance monolithique en finale sur des accents fruités de poire blanche et de pêche. Un vin démonstratif et dominateur qui pour être vraiment abouti manque de poli dans sa texture et de précision nasale.