La Côte de Beaune: Le vignoble de Beaune, singulier et trop meconnu

Publié le par Patrick Essa

 Si la côte de Beaune est mondialement reconnue pour la qualité de ses vins blancs et rouges, l'appellation de la ville qui lui donne son nom a tendance à rester dans l'ombre. Pourtant son vignoble est exceptionnel et les crus qui s'y épanouissent de grande qualité. Le vin de Beaune, très anciennement réputé a été un peu mis de côté au moment des classements en grands crus car le puissant négoce de la place n'a pas souhaité alors - un peu comme à Nuits - inclure le coteau de Grèves au plus haut niveau de la hiérarchie, préférant par la suite largement découper les premiers crus.

 

     Ainsi, assez curieusement aujourd'hui, le finage est majoritairement classé premier cru, certains n'en ayant pas complètement la classe aux côtés de  quelques uns qui mériteraient de se voir promus "grands crus". Les deux plus célèbres Grèves et Bressandes seraient je crois tout à fait dignes de cet honneur car ils sont d'une régularité exemplaire conférée par une situation idéale sur un vignoble d'excellente valeur agrologique.

   Large coteau directement orienté à l'Est reposant sur des sols bruns calcaires composés d'éboulis, ils varient de bas en haut selon une quantité d'argiles décroissantes et  de marnes croissantes. C'est un substrat idéal pour le pinot noir qui évidemment dans les parties sommitales des coteaux les plus larges laisse poindre de forts belles zones pour le chardonnay. Dans l'influence du mouvement synclinal de Volnay il est entaillé par des combes plus ou moins vastes qui dessinent des pentes aux diverses orientations pour les vignes qui y sont installées. Rouges, blancs, vins mûrs, frais, tendres, puissants, délicats ou virils.

   On trouve de très nombreuses expressions sur ce terroir Beaunois, dont on pense parfois qu'il magnifie l'esprit variétal du noirien. Un Beaune de noble origine est ainsi un vin qui "pinote" intensément en livrant de forts beaux arômes de petits fruits rouges sur une texture la plupart du temps soyeuse mais qui peut être également plus ferme sur de rares secteurs. Celui des Aigrots en particulier. 

   La Combe qui va en direction de Bouze Lès Beaune sépare deux coteaux distincts qui n'ont pas véritablement de réelle unité sur le plan de l'équilibre des vins qu'ils portent car les deux secteurs disposent de crus tantôt fermement constitués, tantôt plus délicatement architecturés mais toujours sur un fruité saillant.

     Située au milieu du vignoble cette séparation est pourtant en général considérée comme l'un des vecteurs qui conditionne le caractère des Beaune car son influence sur la circulation des vents est essentielle. Si les Beaune les plus célèbres sont positionnés sur le coteau Nord qui touchent l'autoroute A7 car ils sont moins sous la domination des courants d'air frais, il ne faut pas négliger la partie Sud, qui plus hétérogène et souvent moins pentue abrite des vins distingués au caractère de bouche étonnant de douceur.

 

beaune.gif

 

    Le coteau Nord va des Marconnets au Nord jusqu'aux excellents Cras et Teurons - ou Theurons - au Sud. Large pente qui commence doucement contre la ville, elle termine de manière fort abrupte sur des zones plus calcaires, parfois plantées de blancs. Les crus du Nord sont très fins et se densifient au fur et à mesure que l'on grimpe sur le coteau car les sols y sont moins sablonneux et plus directement marno-calcaires.

  Les meilleurs sont je crois sans contredits possible les Fèves pour leur suprême finesse, les Grèves pour leur densité de texture, les Bressandes car les plus complets de l'appellation entre force et finesse et le magique petits crus de Cras qui toujours séveux et plein d'énergie. Non loin dans le Cru de Coucherias se trouve l'un des meilleurs clos communal, le Clos de la Féguine. Les autres climats sont souvent assemblés et en dehors de Cent-Vignes, Theurons du milieu et du dessus et Toussaints ils ne méritent guère d'être revendiqués pour eux même.

   On mentionnera ici la fort célèbre Vigne de l'Enfant Jésus incluse dans le milieu des Grèves qui possède à l'évidence la classe d'un des meilleurs  Grand Cru de Bourgogne à part entière. C'est un cru racé, plein de chair et capable de vieillir admirablement. Si l'on classe un jour des vignes à Meursault, Pommard ou Volnay, ce cru là devra les accompagner.

 

 

   Le Coteau Sud est plus influencé par les vents qui viennent de la Combe de Bouze et de celle - plus petite - de Lulunne et à l'exception des Aigrots et Clos des Mouches est moins élevé et moins pentu.  Dans les crus situés entre 230 et 280 mètres d'altitude le substrat est plus marqué par les argiles et moins par les sables. Les vins y puisent un caractère un peu plus terrien et non dénué de finesse qui annonce les grands Pommards qui prolongent ce coteau. Je préfère souvent le Clos des Mouches au Sud qui donne des blancs et des rouges d'une race impeccable, ils sont du niveau des Grèves sur un registre plus fin et avec des parfums plus spirituels.

   Ensuite Epenottes, Avaux et Vignes Franches sont de très bons spécimens de vins intensément fruités et gourmands qui s'ouvrent assez vite mais qui tiennent aussi dans le temps. Le grand carré des Aigrots plus élevé ne me séduit pas toujours par sa rugueuse et froide austérité et les zones plus planes comme Sceaux ou Belissands sont sans doute plus à classer parmi les bons "seconds" crus naturels, ils sont souvent assemblés. Pour eux, un  classement en village avec mention de "lieu-dit" eut été plus approprié.

 

   Le troisième secteur - celui des villages - entoure ces deux coteaux et se compose de deux zones. La première, sous les crus, donne des vins robustes et francs de goût issus quasi systématiquement du pinot noir. La seconde au dessus des crus est plus pierreuse, calcaire et fraîche et porte les meilleurs villages blancs. Ils ressemblent aux crus d'Auxey-Duresses, des dessus de Meursault et de Monthélie avec un peu plus de douceur de texture. C'est un admirable secteur à "Village" qualitatifs et peu onéreux. Je recommande particulièrement les Monsnières et le Clos des Monsnières.

 

    Producteurs recommandés:

 

Domaine Des Croix à Beaune (tous les 1ers crus)

Domaine Charles à Nantoux (Epenottes et Boucherottes)

Domaine Parigot à Meloisey (Grèves)

Domaine Rossignol-Trapet (Theurons)

Domaine Prieur (Grèves et Clos de la Féguine)

Domaine Tollot-Beaut (Clos du Roi)

Domaine Largeot (Grèves) 

 

 

 

Patrick Essa – 2022

Reproductions et citations interdites sans autorisation de l’auteur

 

Publié dans Beaune

Partager cet article
Repost0